jeudi, juillet 31, 2008

Les vacances, c'est bien...

Ouais... Pour ceux qui en douteraient...

* Se légumer dans le hamac aux rayures bayadères pour une sieste post-prandiale... Avoir le mal de mer au bout de 5 mn.

* Se transvaser sur le bain de soleil à l'ombre de la haie, dans un creux en forme de cabane entre les branches du forsythia et de l'althéa mauve. Regarder le ciel bleu à travers les feuilles vert brillant. Se découvrir sous le couloir aérien des abeilles venues vendanger les pistils des fleurs de l'althéa. Sans bouger, les regarder repartir, le vol titubant, trop lourd des pattes chargées de boules de pollen jaune. Faire l'expérience étrange d'un glissement de l'espace-temps, un trou temporel d'une heure... se dire que peut être on se serait endormi, la tête à l'ombre et les pieds au vent doux.

* Regarder les insectes butiner à tout-va les fleurs de trèfles dans ce qui tient lieu de pelouse. Découvrir avec joie et bonheur que le jardin abrite un hérisson... si seulement il pouvait rameuter parents et amis, chez nous c'est la fête à la limace.

* Se prendre une claque, se rendre compte qu'on ne peut pas faire le bonheur des gens contre leur gré, et que dans une famille recomposée, c'est comme l'aviron, si tout le monde ne rame pas dans le même sens, ça ne peut pas fonctionner.

* Abdiquer. Débarquer le rameur récalcitrant et lui souhaiter bonne chance. Poursuivre sa route, l'embarcation plus légère semble à présent filer dans le sens du vent.

* Faire de superbes rencontres, passer de l'autre coté de l'écran et ouvrir sa porte quelques jours à une "Internet girl" et son loulou. Adorer ça et se promettre de recommencer. Découvrir que la bière de "là-haut" peut titrer à plus de 8° ; ramasser du millepertuis sauvage, passer les soirées à épouiller les délicates fleurs jaunes qui tâchent les doigts de rouge et les enfermer à l'huile d'olive dans feu-des bocaux de compote.

* Ouvrir son jardin, sa table et sa soirée à un duo de jeunes scouts suisses, tentes et sacs au dos, en provenance d'un pélerinage à Salamanque. S'étonner de leur étonnement... Se désoler de la frilosité et du manque de générosité de mes contemporains à l'abri dans leurs maisons bunkerisées. Leur préparer un pic-nic pour la route le lendemain.

* S'émouvoir d'une jolie lettre de remerciement en provenance de Genève.

* Profiter de soirées à l'ombre des platanes du Jardin de Ville pour écouter de la musique et s'émerveiller. Découvrir entre autres l'énergie sur scène d'un Ben Ricour... En mangeant des glaces gingembre-ananas, lait d'amande ou rhubarbe au milieu des étudiants et des "bobos" grenoblois. Faire danser Lapin sur nos épaules. Trouver un super stratagème pour se faufiler à travers la foule trop dense : offrez une glace à une fillette de 3 ans et comme par magie, les eaux s'ouvriront devant elle.

* Végéter. S'étonner des semaines qui ont passé, faire semblant de s'inquiéter de n'avoir pas fait ce que l'on avait prévu. Vous savez, tout ce que pendant l'année on remet aux vacances... cet été je fais du tri... cet été je finis de peindre le plafond du salon... cet été je m'occupe des plinthes... cet été je ponce le lit en bois vernis et je le repeinds... Et finalement remettre à l'été prochain, parce que ma foi, on est bien fatigué de cette année scolaire et on a besoin de récupérer avant de replonger. Se dire que 8 semaines de congés d'été ça n'est pas de trop (je sais, là je fais de la provoc, vous avez le droit de siffler !)

* Faire des savons, des vrais. S'en amuser. Faire des cosmétiques, plein. En remplir le frigo pour les conserver et inventer des produits dont on n'a pas besoin...

* Allez lire les blogs, les votres, et avoir la flemme de commenter... en avoir mauvaise conscience et se dire "demain je mets un com". Et ainsi de suite.

* Se réjouir des commentaires sporadiques en guise de clin d'oeil d'un "anonyme-Fréderic", surgi des années facs et reconnecté à moi par la magie de la blogosphère (it's a small small world...) S'en réjouir d'autant plus que... (voir billet précédent)

* Rechercher et compter les duvets, préparer doucettement les affaires de camping pour la semaine prochaine. Réserver les stages canyoning sur place pour les garçons.

* Carpe Diem. Vivre de beaucoup d'amour et d'un peu d'eau fraiche. De beaucoup d'amour, surtout. Lutter pour le conserver, envers et contre beaucoup.

Parce que le bonheur, ben c'est vachement bon !!

Alors bon été et beaucoup de bonheur chez vous !

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mercredi, juillet 16, 2008

Simon


Quand je l'ai rencontré, il avait une 4L fourgonnette blanche. Avec, il faisait les allers-retours entre le lycée où il était surveillant d'internat, quelque part dans la Drôme, et la grande ville où il était étudiant, lovée au confluent des trois vallées. Fanfaron, drôle et irrévérencieux. Lorsque Bernard m'a présenté son meilleur ami, il est descendu de sa fourgonnette, avec l'élégance discrète de la vraie bourgeoise. Un sacré contraste. Il a attaqué direct avec un truc du genre «j'habite dans ma voiture, je suis sans domicile», démenti immédiatement par Bernard. Son domicile, je l'ai découvert plus tard, perchait sur les hauteurs les plus huppées de la ville, non loin de l'hôpital, au bout d'une impasse qui s'accroche à la montagne, sur le flanc du Mont Rachais.

Pendant un an, nous nous sommes peu vus. Peu vus pendant l'année où j'étais la copine de son meilleur ami. Puis l'ennui m'a gagné et je n'ai plus été l'amie de son ami. Un jour, il m'a appelée. «Tu te souviens de moi ? Le copain de Bernard. Ça te dit, un pot en ville ? » Il avait troqué sa 4L contre un cabriolet spider rouge. Fanfaron, drôle, irrévérencieux. La voiture lui allait bien. Il venait me chercher à la fac, se garait juste devant le bâtiment de Langues et Lettres, on ne peut plus discret. Je me glissais, cramoisie, sur les sièges de cuir noir. Ça le faisait rire, ça m'intimidait à mourrir.


Des fêtes qu'il organisait dans les châteaux particuliers de la région, dans des lieux inhabituels à l'époque, dans des usines, sur des fortifications. Des ballades au bord de l'eau et des sauts jusqu'à Annecy pour regarder les cygnes en mangeant des glaces.


Il y avait des semaines, des mois avec, et des semaines, des mois sans. Il suffisait d'un coup de téléphone pour renouer le lien à l'endroit où il était resté la fois précédente.


- Allo ? Tu fais quoi ce soir ?

Je savais alors qu'il avait besoin d'une oreille, d'une présence, que quelque chose dans son quotidien lui faisait du mal. Un restau, un pot en ville, une pause à regarder la ville d'en haut, la nuit. A parler. Beaucoup et tout le temps. Des heures.

- Allo ? Je peux passer ce soir ?

Il savait se rendre disponible pour moi. Jamais, un appel au secours à l'improviste n'est tombé dans le vide.

Nous nous sommes installés dans nos vies de couple respectives. Il n'a jamais rien dit. Ou presque. Moi non plus.

- Allo ? Tu fais quoi ce soir ?

Ce soir-là, j'ai cru à une plaisanterie, nous habitions à 500 km l'un de l'autre. Pourtant, il était là. Il faisait un détour de 150 km pour passer me faire coucou dans le Pas-de-Calais. Il est resté deux jours. Ses clients ont attendu. J'étais en congés maternité. Il est reparti en me disant

-Redescend à Grenoble, t'as rien à faire là.

La suite lui a donné raison. C'est la seule fois qu'il a donné un avis sur mes choix. Mais il était toujours là pour recevoir mes appels.

Puis il s'est marié.

- Tu vas voir, tu vas retrouver Bernard, rencontrer sa femme et ses enfants. Tu ne connais pas sa femme, n'est-ce pas ?!

Taquin.

Mais je ne me sentais pas d'y aller. Six mois plus tard je quitterai mon mari. Je ne me sentais pas d'exhiber en public celui que je devais encore officiellement présenter comme mon conjoint. J'ai décliné l'invitation au dernier moment, sous un prétexte futile dont je ne suis pas fière aujourd'hui. J'aurais du y aller. Je l'ai appelé, on a parlé, il déménageait. On s'était dit « on se rappelle ». Comme toujours.

J'ai juste reçu une carte de Toulon, non signée. Pas besoin, je connais son écriture. « Il fait beau, il fait chaud, il ne neige pas ».

Puis c'est moi qui ai déménagé. Changé d'adresse et de numéro de téléphone. Plusieurs fois.

Je me suis laissée engloutir dans le tourbillon de mon divorce. Dans ces moments-là, on gère l'urgence. Envie de ne voir personne. On met sa vie sociale sur Pause. Juste un temps. Le temps d'être à nouveau présentable, d'avoir envie de parler. J'avoue que j'ai envoyé bouler nombre de personnes à ce moment-là. J'ai fait la morte.

Puis, le bonheur m'a à nouveau envahie. Je me suis à nouveau sentie de reprendre le fil. J'ai eu à nouveau l'envie de l'intégrer à mes bonheurs. Je me disais que la naissance de ma fille serait un bon départ, un faire-part... Puis le temps a passé. Filé. Depuis deux ans je me dis qu'il faut vraiment vraiment que je contacte ses parents pour retrouver ses coordonnées. Mais la procrastination est ma mauvaise habitude. Je ne peux pas m'en passer.

La semaine dernière, j'ai eu une surprise. J'ai reçu un coup de téléphone. Depuis un an, « Copains-d'autrefois » veut être mon ami et ressurgissent des bouts de mon (long !) passé.

- Allo ? Bonjour, c'est Bernard.

(Bernard... Bernard.. Bernard qui ? )

Après les échanges cordiaux d'usage et chapelets de souvenirs moins précis pour moi que pour lui, j'en viens à lui demander

- Tu as des nouvelles de Simon ? La dernière fois que j'en ai eu il avait déménagé sur Toulon après son mariage....


- Ah oui... pauvre Simon...

(là, j'ai failli dire « pourquoi ? Qu'est-ce qu'il a ? Il a divorcé ? »)

- Qu'est-ce qu'il fait en ce moment ? Il est toujours là-bas ?


- Tu n'es pas au courant ?

- Euh.. non ?

- Il est mort. Ça va faire deux ans en septembre.


Mâchoire serrée, regard fixe, j'ai écouté le silence du téléphone. Un long moment. Depuis, j'accuse le coup.

J'entends sa voix sans cesse. Son image danse dans ma tête et se superpose au quotidien. Mais ça passera.


Avec le temps, avec le temps, va, tout s'en va.








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mercredi, juillet 02, 2008

Punching ball


Je me suis affalée sur l'accoudoir du canapé, avant de me laisser basculer sur les coussins. Puis j'ai posé mes jambes en hauteur, sur le dossier rouge. J'ai fermé les yeux et je me suis concentrée sur la migraine, celle des grands jours, celle qui vrille les yeux, qui enserre le crâne comme un instrument de torture du Moyen-Age. J'ai la nausée. Je me concentre pour la repérer, pour me recroqueviller intérieurement sous la douleur, pour la rendre plus supportable. La canaliser, la maitriser, la circonscrire à défaut de la vaincre. En dissocier le reste de mon corps pour continuer à marche, penser. Je deviens imperméable aux mots qui me sont adressés.

Ainé me mitraille des mots que je ne distingue pas nettement. Je ne veux pas écouter. Je sais de quoi il s'agit et j'ai déjà dit non. Juste le son lointain de sa voix qui, d'énervement, vire à l'aigüe. J'aime sa voix.

- Non, Ainé, je ne vais pas te laisser faire du camping sauvage au bord du lac. D'autant que le camping et la baignade sont interdits, là-bas.

- ......

- Oui mais même, ça n'est pas une raison. Si encore il y avait un adulte avec vous... mais non, 15 ado de 14 à 16 ans toute une nuit au bord d'un lac loin de tout, non, je ne le sens pas du tout et tu n' en feras pas partie. Plus tard, tu auras mille occasions de faire ce genre de trucs avec tes potes.

- ......

- Mais non, vous n'allez pas vous perdre de vue parce que vous vous éparpillez dans plusieurs lycées, ça va, y a que 15 kms qui vous séparent, y a des bus, des trains et des week end.

- .....

- Si, ça n'est pas une question de "pas confiance en toi", j'estime que vous n'êtes pas assez âgés et matures pour improviser face à un danger ou un grave imprévu...

- .....

- Ben plein de choses, il peut vous arriver plein de choses que vous n'imaginez même pas ! Et puis non, un portable ça n'empêche pas une noyade dans un lac dont on connait les tourbillons, mon gars.

Ainé essaie toujours de m'avoir à l'usure. Il me canarde de mots, de remarques cohérentes et structurées malgré sa colère. Il mitraille au "DAMAA" (Discours-d'assaut-manufacture-d'armes-Adolescente). Ils maitrisent tous cette arme-là très bien. Ainé ne supplie pas. Jamais. Il convainc. Il expose. Il marchande, il négocie. Il promet, un peu. Enfin, il fait des promesses d'ivrognes... Il mitraille de mots. Et ses mots, lointains, se cognent contre mon crâne, blindé. Ses mots dansent autour de moi. Blindée. Ses mots en colère tournent autour de ma tête et je voudrais réagir, je voudrais lui enlever la peine que je lui crée. Je voudrais le rendre heureux, lui faire plaisir. Mais non, là ça n'est pas possible. J'assume.

- Je sais que tu m'en veux, que tu vas m'en vouloir, que je te fais mal...oui, comme tu dis en ricanant, "c'est pour ton bien". Je me demande même pourquoi je discute avec toi.

Trouver l'énergie de me lever, d'affronter son regard courroucé, de gravir les escaliers avant de me jeter sur mon lit. Tous feux éteints. J'ai laissé la tempête se calmer d'elle-même. J'ai admis qu'il m'en veuille "pendant des années même si je vivais jusqu'à mille ans je t'en voudrais encore". Pas grave, s'il m'en veut de lui avoir refusé une sortie avec ses potes, pas grave si ce soir-là il a pensé que j'étais la pire des pires de toutes les mères du monde (et les parents de ses copains qui sont tellement plus cool, EUX, alors que lui est là à se faire ch*** dans une famille qui lui interdit toujours tout et qui l'infantilise et qui ne lui fait JAMAIS confiance et qui le traite comme un bébé non mais comment tu veux que je puisse grandir et m'épanouir, hein ?!'tiiiin, c'est trop nul ici)

J'ai expliqué à nouveau. Motivé mon refus. Non négociable. De toutes façons, le lendemain, je lui refuserai la location et visionnage d'un DVD d'horreur interdit aux moins de 16 ans. Non négociable égaement. Et à nouveau je le contrarierai à 2h30 du matin en envoyant nos ados au lit au lieu de bavarder dans le jardin. 'tiiiin, c'est pas vraiiiii, quoi, on peut jamais rien faire ici !!!!

J'ai maitrisé la migraine, j'ai dit non et j'ai tenu bon. J'ai survécu. A la migraine et à la colère filiale. Heureusement, Ainé n'est pas rancunier. Ni boudeur longtemps. Les poings ont cogné les murs, renversé le bureau, décroché la lampe de chevet et démonté la tringle à rideaux. La tempête est passée. N'en parlons plus.

- J'ai vu mes potes sur MSN ils m'ont dit qu'ils s'étaient trop éclatés au lac.... j'ai grave les boules.

Je n'ai rien entendu. Rien du tout.

- Qui veut finir la salade de fruits ?

J'ai l'impression d'être une survivante. Une rescapée. Comme nombre d'entre nous/vous. Jusqu'à la prochaine fois.

DEMAIN SOIR ....

VACAAAAAANCES !!!!!!

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