Toujours plus haut
Il y a des semaines plus difficiles que d'autres. Il y a des jours qui se suivent, et se suivent et s'empilent ...
C'est une tentative de suicide au collège, un matin...
C'est une bagarre acharnée et violente pour des broutilles...
C'est une matraque tombée d'un sac en plein cours...
C'est un inquiétant mouvement de foule à la récré vers un coin de la cour...
C'est une tension palpable qui s'épaissit chaque semaine un peu plus... on se demande quand ça va craquer... mais quand donc...
Dans cette attente, c'est une ambiance qui se plombe chaque jour un peu plus dans la salle des profs...
Que les kilos de chocolats engloutis quotidiennement ne parviennent plus à adoucir...
Ce sont nos visages qui se ferment lorsque retentit la 1ère sonnerie de fin de récré...
Ce sont des vannes de trop-plein qui lâchent en plein cours...
Ce sont des élèves qui filment l'inadmissible au portable et qui balancent sur le Net...
Ce sont des jeunes qui devraient être dans d'autres structures plus adaptées mais qui sont chez nous par manque de place...
Ce sont des éducateurs trop peu nombreux, débordés eux aussi et avec lesquels on aimerait bien travailler en tandem...
Ce sont des gamins cabossés de partout qui explosent dans l'Ecole... parce qu'ici, au moins on les écoute.
On fait attention à eux.
Pour l'instant encore.
Ce sont des dépressions à la pelle...
Des absences non remplacées...
Des replis sur soi pour éviter porter le fardeau des difficultés de l'autre... parce qu'on a déjà du mal avec les siennes, trop similaires...
De la parole qui se libère en flots intarissables à la cantine mais qui ne soulage point.
Parce que ça n'est pas nous qui détenons les solutions.
C'est cette impression de souquer de plus en plus vite de nos petites mains inutiles...
Faire mieux avec moins.
Consoler, rafistoler, faire en sorte que... Jongler toujours plus rapidement.
Prendre de plein fouet les maux et misères du dehors.
Les écouter parler de leurs parents dépassés, de leurs grands frères en prison et de leur expérience du Juge pour Enfants
De leur dégoût de la société
De l'immense attente qu'ils ont de nous...
Faire mieux avec moins...
Toujours...
Plus haut
Avec de moins en moins.
Plus haut parce qu'on part de plus bas, d'un peu plus bas chaque année
Inventer chaque jour
Se réinventer chaque jour la motivation
Indéfectible malgré tout.
Beaucoup s'en vont ailleurs.
La mort dans l'âme de n'avoir pas pu ...
Finir la semaine, sonnée, par un coup de fil furieux d'une mère d'élève, dont le fils a oublié son blouson dans ma salle. Madame, je ne peux pas, aux 150 adolescents qui me passent dans les mains quotidiennement, rappeler en sortant "prenez-vos-moufles-vos-bonnets-vos-trousses-vos-crayons-votre-équerre-votre-gomme-votre-sac-de-sport-votre-blouson"
M'entendre rétorquer que j'ai la belle vie, moi...
Et rester zen.
Profiter des trop courts week end.
Et reprendre la bête à bras-le-corps dès le lundi.
Pour une nouvelle semaine pleine de surprises...
Mais parfois, les trop courts week end ne suffisent plus à repartir de zéro le lundi...
Me dire que dans 5 ans, 10 ans, j'aurais encore moins pour faire encore mieux...
C'est trop de frustration...
Car je suis incapable de miracles...
C'est une tentative de suicide au collège, un matin...
C'est une bagarre acharnée et violente pour des broutilles...
C'est une matraque tombée d'un sac en plein cours...
C'est un inquiétant mouvement de foule à la récré vers un coin de la cour...
C'est une tension palpable qui s'épaissit chaque semaine un peu plus... on se demande quand ça va craquer... mais quand donc...
Dans cette attente, c'est une ambiance qui se plombe chaque jour un peu plus dans la salle des profs...
Que les kilos de chocolats engloutis quotidiennement ne parviennent plus à adoucir...
Ce sont nos visages qui se ferment lorsque retentit la 1ère sonnerie de fin de récré...
Ce sont des vannes de trop-plein qui lâchent en plein cours...
Ce sont des élèves qui filment l'inadmissible au portable et qui balancent sur le Net...
Ce sont des jeunes qui devraient être dans d'autres structures plus adaptées mais qui sont chez nous par manque de place...
Ce sont des éducateurs trop peu nombreux, débordés eux aussi et avec lesquels on aimerait bien travailler en tandem...
Ce sont des gamins cabossés de partout qui explosent dans l'Ecole... parce qu'ici, au moins on les écoute.
On fait attention à eux.
Pour l'instant encore.
Ce sont des dépressions à la pelle...
Des absences non remplacées...
Des replis sur soi pour éviter porter le fardeau des difficultés de l'autre... parce qu'on a déjà du mal avec les siennes, trop similaires...
De la parole qui se libère en flots intarissables à la cantine mais qui ne soulage point.
Parce que ça n'est pas nous qui détenons les solutions.
C'est cette impression de souquer de plus en plus vite de nos petites mains inutiles...
Faire mieux avec moins.
Consoler, rafistoler, faire en sorte que... Jongler toujours plus rapidement.
Prendre de plein fouet les maux et misères du dehors.
Les écouter parler de leurs parents dépassés, de leurs grands frères en prison et de leur expérience du Juge pour Enfants
De leur dégoût de la société
De l'immense attente qu'ils ont de nous...
Faire mieux avec moins...
Toujours...
Plus haut
Avec de moins en moins.
Plus haut parce qu'on part de plus bas, d'un peu plus bas chaque année
Inventer chaque jour
Se réinventer chaque jour la motivation
Indéfectible malgré tout.
Beaucoup s'en vont ailleurs.
La mort dans l'âme de n'avoir pas pu ...
Finir la semaine, sonnée, par un coup de fil furieux d'une mère d'élève, dont le fils a oublié son blouson dans ma salle. Madame, je ne peux pas, aux 150 adolescents qui me passent dans les mains quotidiennement, rappeler en sortant "prenez-vos-moufles-vos-bonnets-vos-trousses-vos-crayons-votre-équerre-votre-gomme-votre-sac-de-sport-votre-blouson"
M'entendre rétorquer que j'ai la belle vie, moi...
Et rester zen.
Profiter des trop courts week end.
Et reprendre la bête à bras-le-corps dès le lundi.
Pour une nouvelle semaine pleine de surprises...
Mais parfois, les trop courts week end ne suffisent plus à repartir de zéro le lundi...
Me dire que dans 5 ans, 10 ans, j'aurais encore moins pour faire encore mieux...
C'est trop de frustration...
Car je suis incapable de miracles...
Libellés : ma vie chez les zépiens
18 Comments:
Je comprends ce sentiment... C'est celui qui me paralyse dans mon métier par moments.
Courage et chocolats, tout plein.
J'ai l'impression d'entendre ma fille, me raconter sa semaine. Elle est prof, elle aussi, toute jeune. Une ado, en ce moment, lui pourrit bien la vie. C'est difficile. Alors, je l'écoute, le plus possible, pour qu'elle soit soulagée. Mais que faire....
j'aimerai bien faire partie d'une école de parents. car aux dires de ma fille, ils sont bien nombreux à s'avouer complètement dépassés. peut être que je pourrai être utile. c'est à étudier.
j'espère que poser ces mots, là, pour qu'on te lise, te fait du bien. n'hésite surtout, nous, on te soutient, en te lisant.
Je ne peux que ...compatir, mais je le fais très sincèrement...! Bon courage et bonne semaine.
Ne baisse pas les bras. Tu sais que nos existences sont brèves, et même si tu te sens fatiguée et dépassée maintenant, tout ce que tu fais pour "eux" est essentiel ! Ton métier est essentiel. Et ton action donne un bien joli sens à ta vie il me semble. Je t'admire.
Sincèrement.
Continue...
Manderley
PS : t'ai envoyé des photos de mon ado, tu verras, entre les tiens et la mienne, y'a pas photo, ils sont "TERRIBLE" !
Bisous et courage !
Manderley
J'admire sincèrement les profs, sincèrement.
Dans mon métier aussi, les contacts sont de plus en plus agressifs, et nous aussi nous réfugions dans le chocolat, mais à force c'est pénible de devoir sans cesse prendre une taille de pantalon en plus ;)
ça vaut tous les reportages sur les établissements "difficiles" Te souhaiter bon courage ne changera pas grand chose...
Que dire face à ce billet. Que certains (beaucoup) devraient le lire, ce qui leur permettrait (peut être) de relativiser. Dans l'ancien établissement des enfants, beaucoup de profs se plaignaient, n'ayant jamais connu autre chose, et puis est arrivée une instit qui venait d'une ZEP et venait pour un an dans un 'lycée français de l'étranger'. Elle a été sidérée et écoeurée par l'attitude de tous, parents et enfants qui se plaignaient de c***ries ... Elle est repartie au bout d'un an, en me disant que l'on aurait du envoyer les 3/4 des profs et des parents dans une ZEP, pour leur apprendre à réfléchir ... J'espère que tu as parfois des satisfactions qui te permettent de continuer ... Bonne semaine.
* Liliajeunebergère, nous sommes sur le même radeau... parfois ça me bloque aussi, plus souvent ,ça me révolte...
*Salpiglossis, courage à ta jeune et qu'elle ne baisse pas les bras jamais. Une école des parents,il y en a mais faire la démarche d'y aller est déjà en tant que parent c'est que la prise de conscience est déjà faite. C'est aussi accepter de remettre en question ses méthodes éducatives...Mais quid de tous les parents qui n'acceptent pas la remise en cause et une implication plus forte ?
Poser les mots ? j'avais envie de dire tout ça, quand même, au lendemain d'une grève...
* Tanette, merci, ça aide un peu que le "grand public" soutienne...
* Manderley, je ne baisse pas les bras... mais parfois j'ai des crampes, à avoir toujours les mains en l'air... Au fait, tu as prévu une dot pour ta fille ?!
* Valerie, finalement ces dernières années ce sont les fabricants de chocolat qui se frottent les mains. Et à mon avis ils ont encore de beaux jours devant eux :-) Courage à toi aussi...
* Bricol, non, ça ne change pas mais ça m'aide. Merci.
*Ms, c'est clair qu'il faudrait que presque tous (du moins les plus solides...tout le monde n'y survit pas) y passent un petit peu. Oui c'est parfois difficile, mais ce ne sont pas tant les élèves eux-mêmes qui sont durs que ce qu'ils nous rapportent du dehors. Et qu'ils ne devraient même pas avoir à vivre.
Tu devrais l'envoyer à un journal ton texte. Il prend les tripes, pas de plainte, juste un constat froid.
Tu devrais le diffuser largement comme témoignage, pour que des gens comme moi qui n'ont aucune idée de ce qui se passe aient froid ds le dos et se disent "mais on ne peut pas continuer comme ça"
T on billet me rend dingue. Comment cette bande de pignoufs qui nous gouvernent peuvent-ils laisser perdurer ces situations invivables dans l'éducation nationale. Je ne décolère pas. je connais trop la zep pour ne pas comprendre ce que tu ressens, ce mélange de colère, d'impuissance et de découragement. Je suis de tout coeur avec toi.
Recevez tout notre soutien..
et moi je te remercie, ce sera ma manière de te soutenir: d'abord pour ton passage chez toi qui me fait un très grand plaisir (ben oui c'est vrai) et puis parce que mon job est dur, très dur, alors je me conditionne en me disant que j'ai la chance d'avoir un job et de gagner ma croute et d'avoir des enfants en pleine forme (presque) et un toît, mais en te lisant, je réalise qu'il y a pire que moi: je crois que nous nous rejoignons dans l'impuissance à vouloir améliorer les choses et à nous trouver dans l'incapacité de le faire, mais les circonstances que tu vis me semblent bien plus difficiles à gérer, alors, pour ça et tout le reste, je te remercie et t'encourage à ne pas baisser les bras: qu'est-ce qu'ils feraient eux s'ils ne t'avaient pas?
PS: et le chocolat, tu le met où? j'ai vu la photo et franchement je me pose des questions :-)
Quelle est la durée de vie d'un enseignant...
Combien d'entre vous abandonnent et ne vont pas jusqu'au bout...
Malgré la belle vie, les vacances, et les salaires somptueux (Lol)....
pour mes enfants qui sont dans des classes Segpa...il y a des enseignants qui ont fait le choix d'aider ces jeunes en difficulté. Qu'elles soient purement scolaires (les cas de mes enfants)ou d'ordre familial. Dans la classe de ma fille, 13 élèves, quatre sont en famille d'accueil, deux ont un papa incarcéré, d'autres des mamans "un peu absentes" d'autres encore vivent en foyer...Et les profs sont là présents, attentifs, ils savent qu'ils ne peuvent pas se substituer à la famille mais ils sont un référent. Moi je dis chapeau !
* Lili, ça ne ferait pas avancer le bidule, je le crains... :-( Et non, en effet, on ne peut pas continuer comme ça...
* Célestine, colère, impuissance mais les découragements sont passagers. Pour l'instant...
* Ingrid, merci de votre passage et de votre soutient...
*FVG60, combien abandonnent et ne vont pas au bout ? Beaucoup... Trop.
*Béné, j'en ai déjà parlé l'année dernière (mais cette année je poursuis avec eux encore) mais ce sont eux, "mes" 6è Segpa qui me donnent le plus de satisfactions. Et l'envie forte de continuer avec eux. Certains ont tellement ,tellement besoin qu'un adulte se pose avec eux un moment...
... même si on me payait en lingots d'or je ferais pas ton boulot. Plutôt garder des chèvres... pourquoi t'élèves pas des chèvres dis ?
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