Je profite d'être coincée sans bouger quelques minutes pour cause de vernis qui sèche pour conter rapidement les vacances. Sous le signe du lâcher-prise. Impératif. C'était une question de survie, tout simplement.
Pour les vacances, le Doux et moi ne prévoyons rien à l'avance. Durant l'année, notre quotidien est millimétré au poil près, pas une seconde d'improvisation n'a de place. Alors pour les vacances, vous pensez bien, c'est "total free style". Va où le vent te mène. Du coup, ça exclu le principe de "réservation 6 mois à l'avance" et certaines destinations lointaines qui nécessitent lesdites réservations. C'est notre face bohème...
Après une année lourde et difficile (et celle qui arrive sera identique sinon pire...), nous avons voulu en comité réduit nous offrir calme et repos. Au dernier moment. Sans faire des milliers de kilomètres, afin de pouvoir rentrer en urgence au cas où... (oui, l'expérience m'a appris que lorsque je laisse mes fils chez leur père, il vaut mieux que je puisse rentrer dans la journée, au débotté) Notre choix de formule s'est porté sur un club de vacances, à la dernière minute. Comme ça. Pile LE truc qui ne nous ressemble pas. Seulement, quand pour ce genre de vacances formule-complète tu te décides au dernier moment, les destinations avec places disponibles ne sont pas légion. Qu'à cela ne tienne, ouvrons notre horizon et découvrons l'inconnu. Les clés déposées chez la voisine. Les gamelles des chats remplies à ras bord.
Et zou, nous voilà lancés vers ... la Moselle. Là comme ça, j'aurais dit "ah la Lorraine, arf, 3h de route, facile". Première surprise : le GPS de la voiture n'a pas été d'accord du tout. Mais pas du tout. Il faut que je revois ma carte de France pour ne pas confondre la Lorraine avec le Jura... Près de 700 km pour atterrir juste en dessous du Luxembourg ! A priori pas vraiment l'endroit vers lequel je me serais ruée pour passer des vacances de rêves. Soyons beaux joueurs et laissons-nous surprendre. Jusqu'à ce jour, nos improvisations aventurières ne nous ont jamais déçus. Deuxième surprise : une sorte de micro-climat semblait avoir envahi l'endroit... un froid de gueux et un temps de novembre en Ecosse. Troisième surprise : LA sortie d'autoroute (pas la plus proche, mais la moins éloignée, nuance...) étant fermée (et pas signalée à l'avance, sinon ça n'est pas drôle), c'est un bon détour de 25 km qu'il te faut faire dans une campagne peu accueillante, sur des routes qui n'en finissent pas de longer d'obscures forêts de sapins (et là tu t'attends à voir surgir la Dame Blanche à chaque virage, parce que la fatigue commence à te rendre un tantinet nerveuse dans le soir largement tombé. Tu flippes mais tu ne dis rien...) Quatrième surprise, ils font des concours de bleus pour leurs maisons ? Des bleus pervenche, des bleus Klein, des bleus lavande, des bleus pétants... ça surprend. La couleur doit avoir une signification locale, je ne vois que ça. D'ailleurs, si vous avez l'explication de la prédominance de ce bleu au nord de l'Alsace et en Lorraine, ça m'interesse.
Cinquième surprise, là, au milieu de rien, au bord d'un étang féérique, à l'orée d'une belle forêt comme celles des Alpes, tu découvres LE club dans lequel tu vas séjourner une semaine entière. Ils sont gentils, ils vous ont attendus, passée l'heure du repas, avec le petit dîner.
La grenouillette tous les jours en Kids'Club, les parents les pieds sous la table pour les repas, et rien d'autre à faire (vu le temps de chien dont nous a gratifié Juillet...) que faire des virées en voiture dans la campagne. Découvrir les charmes martiaux de la ligne Maginot (faut aimer... ) Ooooh, un vestige guerrier... quelques kilomètres plus loin, ooOOhh, encore un autre... Bon, ça n'occupe pas une semaine de ballades, moi je vous le dis. Se perdre à l'intérieur sombre des forêts de sapins noirs, ces géants qui élancent leurs troncs vers le ciel en obscurcissant le sous-bois comme en pleine nuit. Je n'aime pas les forêts de sapin, leur obscurité, leur silence m'effraient, les lutins, les farfadets, tout ça... (c'est flippant, une forêt silencieuse... on se croirait dans Evil Dead).
Strasbourg (sous la pluie), sa cathédrale et son joli quartier de la petite France. Si tu veux te faire la semi-complète, tu attends 10mn devant le canal que se lèvent l'écluse et le pont qui laisseront passer le bateau de la visite touristique (ça c'est la vraie complète Touriste avec audioguides en 12 langues inside). Marcher, l'air sombre, dans les rues quasi désertes de Sarreguemine en cherchant désespérément une librairie ouverte (cherche pas, il n'y en a qu'UNE et elle est fermée...) en t'esbaudissant du prix bien bas des soldes dans les boutiques, pour le même article que chez toi (en soldes, chez toi aussi, mais pas les même soldes, semble-t-il). Même impression désolée à Haguenau. Sous la pluie toujours, ne changeons pas un modèle qui a fait ses preuves...
Non, nous ne sommes pas allés jusqu'au Luxembourg, ni même jusqu'en Allemagne. Conversation matinale au lit en amoureux.
- On bouge où aujourd'hui ?
- Bof... t'as envie de bouger ?
- Bof... pas particulièrement. Y a l'Allemagne pas loin, on n'a jamais été aussi près...
- Et ?
- Ben... rien...
- Tu as envie de passer la frontière ?
- Bof... chuis un peu naze, là...
- Moi aussi... Sinon, il est bien ton bouquin ?
- Ouais. Et le tien ?
- Moi aussi. Quand tu auras terminé, on échange ?
- OK.
Nous étions venus nous reposer et jamais nous n'avons autant lu, vautrés sur nos lits dans la chambre. Nous avons lu des heures, dans toutes les positions, assis, couchés, sur un flanc appuyé sur le bras, puis de l'autre coté, sur le dos, sur le ventre. Quand nous avons épuisé notre stock de lecture, nous sommes allés à ce qui au plus proche s'apparentait à une boutique vendant du livre. Entre autres. J'ai voulu acheter Le Canard, pour changer de mes romans policiers. Pas de Canard Enchainé sur son tourniquet. Ni de Libération. Pas même Le Monde. Juste Le Républicain Lorrain et Minute. Ami touriste, sois le bienvenu...
Nous voulions du repos, du sommeil, du farniente. Nous avons eu tout ça. Le spectacle de la grenouillette en prime en fin de séjour. Et les caisses de Gewurst' dans le coffre (quand même, hein !) Mission accomplie. Ou presque...
Non sans quelques surprises familiales : lorsque nous sommes partis, nos grands étaient "en face", comprenez "chez l'Autre". Mais c'était sans compter sur Facebook et la formidable faculté qu'ont nos grands ados à monter dans l'instant des plans pas toujours foireux, même éloignés de plus de 100 km (je parle là du Beau-fils et de son binôme mon Ainé)
Les deux "presque majeurs" ont fait ni une ni 2, ont faussé compagnie à l'autre parent, ont récupéré les clés chez la voisine et se sont installés (avec potes...) dans la maison désertée. Si ça n'est pas de l'organisation, je ne m'y connais pas !
Mon sang de mère d'une part, et de propriétaire de la maison d'autre part n'a fait qu'un tour et je me suis imaginée les pires baccanales dans ma maison non-fumeurs laissée toute propre au départ ! Foin de lâcher-prise ! Zénitude, tiens, mon oeil ! N'empêche, non seulement ils sont allés chercher (et manger !) les légumes de l'AMAP mais quand nous sommes rentrés, la maison était propre, le lave-vaisselle tournait et l'évier était vide ! Aucun "cadavre" de bouteille suspect, ni odeur de tabac froid à l'intérieur de la maison, pas de vaisselle moisie dans tous les coins... Alléluiah... Nos grands seraient-ils enfin "presque" vraiment grands et responsables ?! Voyons-nous ENFIN le fruit de 18 ans d'une éducation aussi laborieuse qu'improvisée ?!
Réponse dans le prochain épisode... Très bientôt
Ah, j'ai fait de nombreuses photos, des colorama lorrains qui dorment dans l'APN du Doux. Coming soon...
* NDLR : en vrai, la Lorraine ça doit valoir le détour... par beau temps.
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