samedi, mars 31, 2007

La citation du jour

Image tirée de



"La société des femmes gâte les moeurs et forme le goût"


Montesquieu, l'Esprit des lois, livre XIX


(Re)trouvé dans

Le Bonheur de faire l'amour dans sa cuisine et vice-versa/ Irène Frain.-Le livre de Poche

Vous ne consommerez plus la cuisine d'autrui de la même façon... Je vous souhaite un savoureux week-end !

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mardi, mars 27, 2007

Doélévi-3

La maison de Grand-Papa








Après la traversée de la ville jusqu’au quartier Zongo, qui deviendra le lieu privilégié de toutes mes vacances pendant six ans, je découvris le «Carré». On appelle ainsi ces lieux de vie qui regroupent plusieurs habitations, plusieurs bâtiments accroupis autour d’une cour commune, et qui rassemblent plusieurs membres de la même famille. Ainsi, le carré de Grand-Papa accueillait les appartements de tonton Richard et de tantie Solange, encore étudiants. De la rue, le carré familial n’offrait au passant qu’un long mur ajouré de claustras beiges et de lourds massifs de bougainvillés. Dissuasive, une rangée de tessons colorés se dressait à son sommet. A son extrémité gauche, un portail de fer plein suggérait l’existence d’un garage, donc d’une voiture, donc d’une famille plus aisée que la moyenne. A l’autre bout, une centaine de mètres plus loin, un portail piéton identique. Une fois passé le petit portail, une courette de sable, en guise d’anti-chambre, accueillait le visiteur et lui offrait l’ombre et les fruits suaves du corossolier.



En face, une allée caressait sur sa droite un bâtiment bas, logements de mon oncle et ma tante ainsi que les pièces réservées à Grand-Maman et la salle à manger commune. Et sur la gauche, le crépi aveugle de la maison principale. Au bout du chemin, la grande cuisine, à demi abritée, ouvrait ses foyers au visiteur tandis que sur sa gauche s’étendait une deuxième cour de sable, la vraie, la grande. La cour de la grande maison, où s’épanouissaient manguiers greffés bas, citronniers et corossoliers. Et quelques poules et canards. Entourée d’hibiscus géants, de bougainvillés et d’agaves piquantes, la maison principale, avec ses persiennes mi-closes et ses hauts plafonds, était fraîche et solennelle comme une église. Là, c'était le salon, les pièces de Grand-Papa et les chambres d’amis. Je n’aimais guère cette grande maison d’apparat, la cuisine était le lieu de vie, mon préféré.

Le premier repas, nous l’avons pris tous ensemble dans la salle à manger, au rythme des visites de voisins qui passaient souhaiter la bienvenue, faire connaissance, se présenter, souvent accompagnés d’enfants timides et curieux. Ce repas devait être l’un des rares que nous prendrons tous ensemble, tonton et tantie présents, arrosé exceptionnellement de Fanta-orange et de Youki-citron tiède. Généralement, les jeunes préféraient dîner dehors avec des amis ou assis sur un petit tabouret dans le giron de la cuisine, avec leur mère et les deux domestiques, Simon et Mariama. Nous aussi, l’envie nous prendra souvent, à ma sœur et à moi, d’aller y prendre nos repas, y rire, y discuter. Au grand dam de Grand-Papa.


C’est par ses cuisines et sa cuisine qu’un pays se découvre, que sa culture se coule en nous.
J’adorais ce lieu où se préparaient les repas, autour des deux foyers à charbon, sous la baguette de Grand-Maman qui menait ses troupes comme un Général conduit ses armées. Imposante stature et voix forte lorsqu’elle les houspillait dans sa langue natale. Simon et Mariama, les deux adolescents «venus du village» courraient, épluchaient, coupaient, taillaient, débitaient les légumes colorés du mieux qu’ils pouvaient, elle se chargeait de mettre en musique, en marmite, goûtait, me faisait goûter, nommait les plats pour moi, les ingrédients, en trois langues. Le gombo, le manioc et l’igname, le piment, la farine de sorgho, de mil, de maïs, l’huile de palme couleur rubis, l’huile de maïs jaune doré, la poudre de crevettes séchées, les arachides sous toutes les formes, les bananes plantain, les feuilles-sauce …

Un matin, Grand-Maman se désolait d’avoir perdu le plus beau de ses canards, dévoré pendant la nuit par «Tout-se-paie 4» (Tousspê, 4è du nom), le terrible chien de garde, volontairement affamé par mon oncle pour le rendre plus méchant. Le jeune Simon était chargé de s’occuper des volailles ; ce jour-là, il tâtera de la chicotte de Grand-Maman pour son malheureux oubli. Cet épisode déclencha chez moi une fascination morbide pour ce chien aux yeux jaunes, qui passait ses journées dans une niche grillagée au fond de la cour, près du mur du garage. Il ne m’en faudra pas plus, quelques mois plus tard, émoustillée par un cousin aussi téméraire, pour nous amuser à rendre fou le pauvre animal en sautant sous son nez devant sa cage et en frappant sur le grillage à coups de bâtons. Et ma sœur de pleurnicher… comme à son habitude.
- Je vais tout diiiire… que vous avez fait exprès, le chien va nous mangeeeer !



Peu de temps après notre arrivée, il se prépara une grande fête. La cuisine était agitée, Grand-Maman s’énervait plus que de coutume, ses jeunes aides semblaient être partout à la fois, Simon ne voulait pas jouer avec moi, Mariama non plus. Au fil de la journée, la maison s’emplissait de nouveaux visages, ma sœur et moi étions bisouillées à tout va par des inconnues aux bras charnus, aux odeurs poudrées et à la peau douce.
- ma fiiiiiiille ! mais comme tu es belle toi, hein ! s’exclamaient-elles en nous claquant un baiser vibrant tandis que nous étouffions entre leur poitrine. Oumpf !
De multiples «tantes» volubiles, cousines, ces familles à rallonges «à l’africaine», des cousins et des oncles moins expansifs. Un tourbillon de couleurs, d’odeurs, d’exclamations, de rires… Pour l’occasion, on nous avait offert, (commandées à l’avance à une couturière qui avait surestimé nos tailles …) à la pleurnicheuse et à moi deux robes en tissu de pagne, à jolies manches ballons et à volants.

- Ce soir on vous fait la présentation aux ancêtres, avait déclaré solennellement Grand-Maman.
Devant mon air interrogateur, elle avait expliqué :
- On va vous présenter aux ancêtres de la famille, ceux qui sont morts, afin qu’ils vous connaissent et vous protègent.
Il n’en fallait pas moins pour terroriser une enfant de huit ans. Ainsi donc on allait déterrer des morts, on allait nous secouer des zombies sous le nez, sortir des trucs des placards peut être (j’ai pensé un instant que si ça se trouvait ils en avaient caché sous mon lit, pour ranger tout ce monde, il leur fallait bien de la place…) C’était hors de question, en aucun cas je ne voulais rencontrer, encore moins bisouiller des générations de morts, fussent-ils mes propres ancêtres… Il a fallu le calme rassurant de ma mère, qui fut tout d’abords secouée de rire, pour apaiser mes craintes.

- C’est la religion de Grand-Maman, ça s’appelle l’animisme*, c’est une religion qui vénère les morts. Et rassure-toi, c’est juste une fête comme ça, les morts vont rester dans leur tombe !

A suivre…

* L'animisme (du latin anima âme) est une croyance ou religion selon laquelle la nature est régie par des âmes ou esprits, analogues à la volonté humaine : les pierres, le vent, les animaux. Il se rencontre surtout chez les sociétés traditionnelles comme en Afrique, en Amérique du Sud, en Amérique du Nord, en Sibérie ou en Océanie. In Wikipedia

Photos de chez Flickr

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dimanche, mars 25, 2007

Doux dimanche...

Pour un We en formation réduite, j'étais pleine d'energie et pétrie de bonnes intentions pour m'attaquer enfin à ceci (tas plus réduits que prévu parceque mon Doux a mis la main à la pâte merci Doux !)


Et puis finalement je ne l'ai pas senti du tout, alors j'ai plutôt fait ça


Un crème à l'oxyde de zinc, calendula, camomille et millepertuis pour mon Lapin
et

une crème pour les mains au gel d'aloe vera, huile de macadamia et thé roïboos. Plus la version lait corporel mais pas de photo.

Et le linge est toujours là... mais je suis contente et je n'ai pas l'impression d'être esclave de mes tâches ménagères !

Et demain c'est lundi mais dernière ligne droite avant deux semaines de congés (je ne devrais pas trop m'en vanter... je sais, désolée ! )

Objectif de la semaine : trouver une activité bien fatigante pour occupper du nain-ado toute la 1ère semaine des vacances ... les gens, plaignez-moi !

Et vous, votre Week end ?

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jeudi, mars 22, 2007

Il y a des jours comme ça...

J. est planté debout devant mon bureau et me regarde depuis déjà un moment. Je suis en train de recouvrir les livres fraîchement achetés pour le CDI et mon visage doit rayonner de bonheur, je suis toute concentrée à cette gratifiante tâche.

- Vous savez bien couvrir les livres, madame, c'est vraiment bien fait, hein.

Je souris. Je ne suis pas difficile, tous les compliments sont bons à prendre. Dans un moment il va me demander si ça faisait partie de ma formation "apprendre à couvrir les livres", il ne sera pas le premier...

- Je peux vous aider ?

Là, on ne me le demande pas deux fois, généreuse que je suis, toujours prête à partager mes activités les plus épanouissantes.

- Bien sûr. Tu sais faire ou tu veux que je te montre un peu avant ?

- Euh... est-ce que je serai payé ?

- !?! Aaah... non !

Je sens que J. est très déçu...

- Parcequ'il faut que je travaille le Week end pour mon argent de poche...

- Dans ce cas tu peux faire du baby-sitting...

- non.

- Tondre la pelouse chez les voisins...

- Non, l'année dernière j'ai voulu le faire chez moi mais la tondeuse est partie toute seule et j'ai jamais pu la rattrapper...

- Ah... oui... en effet... Tu as 18 ans ?

J. sourit, son visage s'illumine.

- Dans une semaine, madame.

- Bieeeeeen... tu peux travailler dans un fast-food, par exemple...

- Ben... pas à la caisse parceque je compte lentement, je m'embrouille avec l'argent...

Oups, j'espère qu'il n'est pas une des sections Comptabilité du lycée...

- Il n'y a pas que ça, tu peux faire les frittes aussi... ou alors la mise en rayon dans les supermarchés pendant les vacances, ou la plonge dans un restau, ou les chambres dans un hôtel...

- Et c'est bien payé ?

- Ah ben le SMIC horaire...

- ça fait combien par jour ?

- Oooof, à la louche, dans les 45 euros par jour...

- HEIN ?! PAS PLUS ? s'est-il écrié ! Pour moins de 90 euros par jour ça vaut vraiment pas le coup, hein !

- ?!!!!

Aterrée je suis...

PS : pour nos lectrices du Québec (si si, il y en a !) je signale que l'Euro de chez nous vaut 1,54 dollars canadiens de chez vous, et que le salaire minimum horaire est à 6,40 euros nets.

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mardi, mars 20, 2007

Bijou, caillou, chou, genou, hibou, joujou...

L'ennemi à abattre est de retour...









Découvert ses bébés ce matin au moment de partir (lui, elle plutôt, avait du sentir venir le truc et se planquer au milieu de la tignasse épaisse de Zébulon, je ne l'ai pas trouvée). Pschitt d'urgence vinaigre de cidre-lavande-tea tree (il sentira bon à l'école mon roudoudou !) Traitement de choc COLLECTIF ce soir en rentrant. Et lessives à 60° à tour de machine toute la nuit (ô bonheur...)


Non mais, certains parasites apportent quelque chose à la chaine alimentaire, ont une utilité parce qu'il en nourrissent d'autres (ou font du bon compost par exemple.) Mais franchement, le POU, trouvez-moi une seule utilité à cette bestiole ? UNE SEULE BONNE raison qu'il a d'exister ?


C'est vraiment ma semaine... je vais les mériter mes séances balnéo

(HEIN , MON DOUX - je sais que tu m'entends..!)

dimanche, mars 18, 2007

Sans titre...

Je réalise que ça fait longtemps que je n'ai pas posté de billet. Pourtant, les idées ne manquent pas, des drôles, des moins drôles sans pour autant être graves, de grandes histoires et des historiettes du quotidien. Mais voilà... je suis à nouveau atteinte du syndrome de la mère de famille... malgré ma vigilance, syndrome de celle qui arrive en fond de réserve d'énergie et de bonne humeur.


Il n'y a pas eu d'hiver, l'automne a étendu ses jours de pluie jusqu'au printemps, mon horloge biologique en est chamboulée, comme jet-laggée. Avec l'explosion des forsythia et des cognassiers du Japon, la vie se réinstalle. Je ne m'en réjouis même pas. Et les remontées des sèves botaniques équivalent aux montées de testostérone chez l'adolescentulus communis, dont je possède trois spécimens mâles dans leur version domesticus (plus un jeune en cours de mutation...) L'adolescentulus communis, contrairement à l'adorable chose qu'il fut à une étape antérieure de son développement, est tout sauf calme, serein, obéissant et de bonne foi. Il est en outre doté d'un sens de la justice aussi aigu que très personnel, et versatile. Bref, son élevage est délicat et requiert au quotidien une énergie loin de toute image d'Epinal, au-delà de la capacité de renouvellement de l'énergie parentale. Et c'est bien là dessus que compte l'adolescentulus pour parfaire sa fulgurante croissance. Il saute d'une humeur peu agréable à l'autre, vampirise, jusqu'à l'usure, son hôte. Donc moi, pour le cas qui nous concerne. Avec une fréquente tendance au braiment et à la gesticulation désordonnée, comme pour effrayer l'adversaire. Votre dévouée en est toute usée, lasse, fatiguée. Fatiguée de courir le matin, fatiguée de battre le rappel dès potron-minet, fatiguée de courir après des bus, après des sonneries de début de cours, fatiguée de se muer tour à tour en chien de berger, en Mary Poppins sans les superpouvoirs, en garde-chiourme, en bonnàtoufaire, en chauffeur, en serveur externe de sauvegarde de données d'autrui... de justifier devant un jury à la dent dure la moindre de ses décisions.

Mais parfois, il arrive que la Mater Familias qui officie également à l'extérieur de son doux foyer puisse trouver, sur son lieu de travail, en plus de beurre dans les épinards familiaux, réconfort, calme et sérénité afin de recharger un peu ses piles de lapin-tambour. Las ! Dès qu'il sort du nid, l'adolescentulus domesticus se déplace en meute, ravageuse, sourde mais non point muette, loin s'en faut. Il devient alors adolescentulus selvaticus et son élevage s'en trouve d'autant moins aisé. Une fois délestée à 8h du matin de mes exemplaires de domesticus, je prends en charge une horde de selvaticus. En fin de mutation, certes, mais rodés au maniement du bélier et dotés d'une patience d'évadé d'Alcatraz.

Peu de temps calme, donc. Peu de temps sans «donner», sans être dans la représentation, dans l'ouverture à l'autre, dans l'effort souvent.


Et quand c'est trop, quand tout ça devient lourd, pesant, quand je n'y prends plus de plaisir, je deviens autiste pour me préserver. Je ne parle plus. Ou alors le minimum, pour entretenir le lien vital à l'autre. Je ne dis plus tout ce que j'ai à dire. Je retiens les mots, les émotions, les colères, les sentiments, les sourires. J'en fais des angines, de toutes ces choses qui me restent coincées en gorge. J'en fais des trous dans mes nuits noires. Des nuits longues comme des jours sans pain. Le vice du cercle.

Je viens chez vous, souvent, je lis. Je reviens et je relis. Mais je commente peu. Je n'ai pas plus envie d'écrire que de parler, dans ces moments-là. Juste besoin , envie, de me poser/pauser. D'arrêter les courses, la course, les «obligations» diverses et nécessaires, juste envie de ne plus être là où l'on m'attend. Mais plutôt là où JE m'attends moi-même.

J'ai une superbe vie à portée de main, sous le coude, un amoureux qui m'ouvre ses bras doux et chauds et que j'aime à en perdre le souffle, des enfants qui, ma foi, ne sont ni des délinquants, ni des voleurs ni des violents, juste une horde jeunes cerfs qui combattent pour le passage à l'âge adulte, le bruit des bois est impressionnant mais ils n'en meurent pas ; un boulot qui treize ans plus tard m'intéresse toujours, avec des adolescentulus qui me font encore bien souvent rire... Juste qu'en ce moment je pédale moins vite ...

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jeudi, mars 08, 2007

Dégâts collatéraux

Un reste d'histoire d'ELLE...








de ci




Un petit bonhomme câlin. Très câlin. Un petit bonhomme arrivé là un peu par hasard , en troisième position , en plein désert. Un petit bonhomme-bouée, bonhomme-radeau, un sauveur bien malgré lui. Et petit bonhomme porteur de cailloux trop lourds pour lui.



Zébulon est effectivement né en pleine tourmente psychologique maternelle. Tempête cachée. Sourde. Muette, plutôt. Zébulon a poussé à l’ombre de ses frères guère plus âgés. Un paquet de bébés regroupés pour se tenir chaud au cœur, quatre toutes petites années pour se fabriquer sa garde rapprochée, ses troupes fidèles, quatre années pour s’ancrer à la vie. Se construire une excellente raison d’être là. Elle a fait tout ça. Elle a construit, brique après brique, pierre après pierre, un bel édifice. Admirable équilibriste.



Avec les mois, Zébulon poussait tranquillement, bébé chouchouté, câliné en plein cœur de la désespérance maternelle. Bébé agité, jamais muet, sans cesse mobile. Avec une frénésie inquiétante. Ou du moins, qui aurait du inquiéter. Mon Zébulon. Et puis un jour, tout seul, à quatre ans, il a décidé que cela suffisait. Qu’il n’était dupe de rien. Qu’il n’était pas à la bonne place. Que quelque chose clochait. Que le cœur maternel n’y était pas. Alors que ses frères disaient des choses comme «des fois je voudrais m’endormir et ne plus me réveiller », ou bien «à quoi ça sert de vivre ?», lui, usant du seul pouvoir (mais ô combien puissant…) dont il disposait, s’est remis à salir ses slips. Et à ne plus aller aux toilettes. A se retenir. A s’en gonfler comme un baudruche. A garder pour lui cette « offrande à la mère », comme disent les livres. Dangereusement. A s’en faire souffrir. A en inquiéter son entourage. A frôler l’occlusion intestinale. Chantage.



Au fil des semaines, Elle coulait un peu plus profond dans le bain de la culpabilité. Mon fils, mon poussin, ma vie. Au fil des semaines, elle usait à nouveau de la même patience qui avait servi à l’apprentissage de la propreté. Et elle jettait les slips souillés. Inlassablement. Jusqu’à ce qu’une hypothèse médicale finisse par se transformer en verdict. En-co-pré-sie. Considéré par la psychiatrie comme un «trouble mental à expression somatique».



Six mois plus tard à peine, l’histoire d’Elle explosait, l’histoire de son couple, de cette jolie-petite-famille-parfaite dont-le-bonheur-faisait-plaisir-à-voir. Elle a fait voler Le Grand Mensonge en éclat et Zébulon s’est ainsi installé dans la contestation.





de


Avec le temps, les bousculades de la vie se tassent, elle (re)prend un cours normal, Zébulon se voit offrir une fratrie élargie, (souvent) bienveillante à son égard, il se voit offrir un nouveau «père de référence», fiable, solide… Il a le soutien suivi compétent de ce que lui offre l’école comme psychologue scolaire et ré-éducateurs, comme enseignants tour à tour dévoués, patients et démunis. En lien avec le psychologue en ville. Chacun y a essayé ses recettes. En vain. Il n'entre dans aucune catégorie. Aucune case pré-existente du système n'est adaptée à son cas..



La perplexité est immense. Plus de quatre années à chercher la clé d’entrée en lui. Près de cinq années à tester toutes les serrures, sans forcer jamais. En vain. Combien d’années de culpabilité maternelle ? Combien de discours culpabilisateurs ? Comment ne pas être si proche de lui, «trop» proche alors qu'il fallait le protéger, en compensant l’absence d’image du père ? Combien de personnes à son chevet, à tenter de réparer le mal fait par si peu de gens ?



Au fil des années, les enfants encoprétiques se désocialisent, s’enferment dans leur singularité, finissent par s’y complaire, par s’assimiler à ce qu’ils retiennent dans leurs intestins. Finissent par se dénigrer tellement que les apprentissages scolaires sont souvent compromis. Ils finissent par se déprécier tellement que la carapace se fait plus dure. D’autant plus que l’auto-victimisation appelle les moqueries des autres enfants. Les fourberies de fond de classe, de fond de cour, de rangs serrés. La dépression guette, tapie dans l’ombre. Pour peu que l’enfant, testé dans une belle volonté générale de trouver enfin une explication, soit déclaré «EIP », enfant précoce. Mais cela ne change rien à l’affaire. Rien du tout. Voire la complique. Zébulon n’est pas «dans le métier d’élève», parait-il. En clair, ça veut dire qu’il ne se fait pas au «groupe-classe». Zébulon a donné à sa mère des envies d’école à la maison. Des envies très fortes. Mais utopiques. Alors Zébulon fera avec ce qu'il y a ...



Des rémissions parfois. Trop rares. Des tendances «au mieux», dirons-nous. En attendant de trouver la clé, un jour. Il parait que ça se débloque souvent tout seul, à l’entrée dans l’âge adulte au plus tard. Zébulon engrange des connaissances, engloutit ses amis les livres comme d’autres font de la boulimie alimentaire. Mais lui garde tout, toutes ses connaissances, tout ce qu’il lit tout seul dans son lit-alcôve le soir, ses dictionnaires, ses encyclopédies… mais ni ses tables de multiplications ni ses conjugaisons.



Aujourd’hui, Zébulon s’épanouit doucement, il se laisse apprivoiser en gardant les yeux grands ouverts sur le monde. Là mais à coté. Présent et absent à la fois. Un enfant de neuf ans pour le moins singulier, solitaire et très attachant. Très fragile. Trop. Qui sait comment il vivra sa vie d’adulte… son adolescence donnera peut être quelques pistes. En tous cas, l’étayage est là.



Zébulon, mon poussin, mon Roudoudou d’amour, je te demande pardon pour tout ça…



Merci à tous ceux qui... surtout à mon Doux et à ses enfants d'en avoir fait votre frère, votre fils...





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lundi, mars 05, 2007

Un virus venu du froid, qu’on appelle gastro entérite

(Amis poètes... par avance, pardon !)

Tout s’annonçait pourtant pas trop mal : timing douche-repas-préparation de sacs de cours du lendemain, repas-lavage de dents et au lit on éteint, tout ça coincé dans 1h30 (hein, chapeau, hein ! ) C’est donc toute fière de mes talents d’organisatrice-née (qui a dit adjudent-chef ?!) que j’ai bizouillé, éteint les lumières et emprunté l’escalier qui mène à mon nid, mon havre. Le moment de la journée que j’aime le plus : celui où je peux, l’esprit serein et libéré de toutes contingences maternelles, me glisser sous la couette, et me coller contre mon doux pour réchauffer mes vieux os. Un moment d’apaisement à nul autre pareil.

Je dormais donc du sommeil du juste, rêvant d’un joli jardin comme dans le magazine qui avait accompagné mon endormissement (joli jardin qui est supposé, dans mon imaginaire, faire suite à la pelade qui m’en tient lieu pour l’heure… souvenez-vous… mon herbe… ben elle n’a guère poussé depuis)
Crouiiiiic… crouiic-crouic…. J’ouvre un œil, je regarde le réveil… 2 :58. « ça va, au pire j’arriverai bien encore à dormir une heure avant le lever ». Hélas, je connais trop les effets désastreux d’un réveil nocturne. Plus dodo. Crouiiiic. Le parquet grince encore derrière la porte, sur la mezzanine… 3 :08.

*****, il va aller se coucher, oui… ! Je soupire un grand coup, je me lève… prête à mordre celui qui m’oblige à me lever de mon nid pour son pipi nocturne (si je me réveille et que je ne sors pas du lit, je peux espérer me rendormir… si je pose un pied par terre, c’est mort…)
Et là, derrière ma porte je tombe sur mon n°2, le teint vert, l’œil pas frais et le cheveux collé au visage…


- Je crois que j’ai envie de vomir…

- (oh non, pitié… tout mais pas ça…dis-moi que tu as 40 de fièvre, que tu as vu un monstre sous ton lit, mais ne joue pas àVomito, pitiéééé) Je vais te donner quelque chose, viens avec moi.


Après m’être assurée, geste réflexe de mère, qu’il n’avait pas de fièvre et que le ventre était souple… Je descends les escaliers, (zut, l’ampoule est grillée) harcelée par la chatte June qui comme chaque nuit s’ennuie et saute sur tout ce qui bouge. Comme un chien heureux de retrouver un peu de compagnie. Elle saute et se suspend à la ceinture du peignoir enfilé à la hâte, débaroule les escaliers, remonte s’enrouler autour de mes chevilles pendant que je tente de descendre les marches le plus rapidement possible. Et ce n’est pas chose facile, cette jeune chatte, dont le passé de bébé abandonné dans un sac plastique dans un container à poubelles a laissé des séquelles (le peu de neurones dont elle devait disposer à la naissance à du fondre par manque d’oxygène) reste collée à moi.C’est ainsi escortée que je remonte porter au jeune malade pâlichon son morceau de sucre à la menthe. Bien inspirée au passage de prendre la bassine rose.

- Je te laisse la bassine, si ça ne va pas…

- Je peux t’appeler ?

- Mais oui bien sûr, appelle-moi (mais si tu peux t’en sortir seul laisse-moi dormir !)

- ça passe pas…

- ça va passer. Bonne nuit mon chéri.

Ouais je sais ,je suis une mauvaise mère, mon devoir aurait été de rester à son chevet, assise à même le sol à lui porter aux lèvres la bassine de plastique. Je sais. Mais ça je ne peux pas… je lui sais gré de ne rien avoir fait avant de venir me chercher. Et je lui sais gré également de bien savoir viser. Sur ce, je retourne me coucher, je sens déjà que… moi-même… est-ce la fatigue… un peu secouée par là aussi…

Toujours aux prises avec la June, que j’envoie valser d’un plat de pied, comme une crosse de hoquet le palet, je pense à mon lit. Salvateur. Que nenni, il n’en sera rien. June s’ennuie, et quand elle s’ennuie, il lui faut de la compagnie. Elle s’en est allée titiller sa camarade, Foulbazard, qui dormait paisiblement près de l’ordinateur portable. Resté allumé mais en veille pour l’instant. Pauvre Foulbazard, traquée jusque dans son profond sommeil , se réveille en sursaut, se retourne, crache, June en bondit sur le clavier du portable. D’un coup l’écran s’allume et surprise, la jeune chatte couleur réglisse-menthe saute sur Foulbazard. S’ensuit une poursuite sur le bureau entre les deux chattes, qui dérapent en faisant voler les papiers qui s’y trouvent (si si, c’est très bien rangé, le bureau, chez nous !)

Je n’ai pas le courage de les mettre dehors, il faudrait les attraper ET les descendre. Une à la fois.
A ce moment-là, je ne sais pas encore que j’ai tord, June s’occupera en jouant longtemps avec une balle de Lapin, faisant rouler sur le parquet la balle de plastique à grelots sonores… jusqu’à ce qu’elle passe par-dessous la rambarde et finisse sa course un étage plus bas dans un bling bling bling bling (la balle… pas le chat )

Je me recouche. Enfin. Mais hélas, pas pour longtemps. Un grand bruit de borborygmes. Reconnaissable. Je soupire à nouveau profondément. Puis je me lève. 3 :34. Pour me diriger à pas lents vers l’origine des glougloutements. La bassine est à moitié pleine. Mon pauvre bonhomme a bien visé en balançant ses tagliatelles au pesto du précédent repas... ou presque.

- Ce n’est pas grave, chéri.

Changer des draps à 3h1/2 du matin, rincer la taie d’oreiller (avant de mettre en machine, c’est mieux d'ôter les morceaux …N'est-ce pas ma Troll ?!) trouver une nouvelle taie. Nettoyer. Le sol et le visage.

- ça va mieux maintenant, maman.

- (tant mieux, moi ça va pas du tout) C’est bien, tu vas pouvoir dormir un peu.

- Je vais à l’école demain quand même ?

- On verra demain.

Je re-retourne me coucher, me disant que c’est une maladie à la contagion bien fulgurante… ou alors est-ce la fatigue… Mon doux se retourne dans le lit

- Qu’est-ce qu’il y a ?

Entend-il seulement ma réponse ?

4:00. Je ne dors toujours pas. Je ne suis pas la seule. Une petite voix de Lapin qui appelle

- Maaaaamaaaaaan ! mamaaaaan !

C’est trop tôt pour un réveil de lapin, j’ai décidé. Mais lapin affamé n’a pas d’oreilles, encore moins de compassion. Je m’enterre sous la couette et m’enfouie le museau dans l’oreiller. Avec un peu de chance, le Doux ne sera pas complètement endormi… Effectivement, mes vœux sont exaucés et il se lève. Je continue de faire l’endormie, ce qui n’est pas vraiment simulé parce que je sens que je n’arriverais pas à bouger, à décoller du lit même si je le voulais.

4:10 Le camion de ramassage des poubelles.
Puis 4 :42
5:12.
Zut, plus qu’une heure 40 avant que le réveil ne sonne.
5:34. Cest la dernière fois que j’ai vu l’heure avant la fatidique 6 :40.

- Oui, tu vas en cours et tu vas à l’infirmerie si ça ne va pas, tu m’appelles.

- Et si je vomis ?

- Tu vas à l’infirmerie et tu m’appelles.

Oui, je suis une mauvaise mère, indigne, qui abandonne son fils malade pour s’en aller vadrouiller … à s’occuper d’enfants d’autrui en bonne santé. Eux. Et au fil de la journée ma détermination s’émousse. Et au fil de la journée je me sens de plus en plus mal… ça y est, il a jeté son virus sur moi. C’est fait. Bougez pas, je reviens…

… La prochaine fois, promis, JE FOUS MA CAGOULE !!!


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