mercredi, novembre 25, 2009

de l'exploitation de l'homme par l'homme

Tout à l'heure, je regardais mon Zébulon (12 ans) débarrasser la table après le déjeuner. Enfin, débarrasser est un grand mot... il voletait, papillonnait, un article à la fois, bondissait, sautillait de la table au lave-vaisselle. Le temps pendant ce temps s'écoulait... s'écoulait... s'écoulait... Et je me disais qu'il était temps que je fasse ce billet, en écho à celui de la Jeunebergère sur les tâches ménagères dévolues (ou pas) à notre progéniture.

Tout ça remonte à loin... lorsque j'attendais mon Zébulon, mon 3è enfant, il était évident pour tout le monde (certains amis, les voisins et passants, ma belle-famille de l'époque...) que "alors, tu vas prendre un congé parental, maintenant ?" Et moi de répondre, en mauvaise mère, que non, je n'avais nullement l'intention de prendre un quelconque congé parental. Au grand dam de la belle-famille, qui voyait déjà ma descendance en grands délinquants multi-récidivistes, entre autres tares... Mais de son avis je me fichais comme d'une guigne. Mes fils ont donc connu l'excellente crèche municipale de Calais ainsi que quelques nounous formidables.

Par la suite, la famille s'est modifiée, recomposée, élargie. Nous étions deux parents travaillant à temps plein, et 5 enfants... 6 un peu plus tard. Doux et moi avons la même vision des choses, de la famille, de l'éducation des enfants, de ce que doit être notre rôle, nos prérogatives, nos limites etc. La famille est une micro-société, une collectivité dans laquelle chacun s'épanouit, trouve son compte, se construit, se console, et surtout apprend le monde,en toute sécurité entouré de l'affection des siens. Mais apprend le monde, en apprend les codes, les us et coutumes. Même s'il a des parents idéalistes, ça n'est pas dans un monde idéal qu'il s'envolera quelques années plus tard... Et dans chaque société, dans chaque communauté, les membres ont des droits mais, dès lors qu'ils sont capables de discernement, des devoirs également. Différents selon l'âge bien évidemment.

J'en viens aux tâches ménagères. Parce que dans ma vie antérieure je me suis épuisée à m'en briser littéralement à TOUT faire pour TOUS, aussitôt divorcée j'ai changé mon fusil d'épaule, ce qui me convenait mieux, et d'autre part les garçons pouvaient comprendre qu'il fallait participer même si ça n'avait plus rien d'amusant.

Nous avons commencé à élaborer des plannings de table-lave-vaisselle, encore en vigueur aujourd'hui. A chacun son jour, à chacun son tour de façon équitable ; le plus petit, avant 9-10 ans, en ayant moins à faire que les ados. Ce partage de base étant acquis, par la suite, d'autres tâches viendront s'ajouter à mesure de l'augmentation de l'argent de poche. Selon le principe du "plus de droits, plus de devoirs", j'ai X ans, mon argent de poche augmente, certes, mais j'ai également un investissement plus grand dans la communauté-famille. Car cette communauté, nous la faisons vivre tous ensemble, elle est ce qu'en font parents ET enfants. Avec nos 6 coquelets à domicile, nous n'avons pas uniquement les 2 parents qui pavent d'or et de plumes le chemin de vie de leur progéniture ; ça ne serait d'ailleurs, il me semble, pas leur rendre service que leur faire croire que dans le monde qui les attend en dehors du nid familial, on a tout pour rien et sans respecter le travail d'autrui... Quels que soient nos idéaux à Doux et à moi, notre conception d'une société plus équitable et plus juste (gna gna gna gna gna gna....), notre rôle de parent est de les amener à trouver (rapidement et sans douleur, si possible...) leur place une fois adulte. Leur donner les clés de la survie, en quelque sorte.

Ainsi, passer l'aspirateur 2 fois par mois (le reste du temps ce sont les parents qui s'y collent), faire LEUR salle de bain toutes les deux semaines, récupérer et plier (ou non...) LEUR linge propre dans les panières adéquates, mettre leur linge au sale (ils disposent chacun d'un panier de linge sale... ledit panier n'étant pas doté d'une mobilité propre, s'il ne se déplace pas jusqu'au panier général de la buanderie, leur linge n'est pas lavé... je ne fais pas le tour des chambres d'ados pour ramasser les chaussettes sales !), ranger leur grotte (je change leurs draps et basta...tant que leur bazar ne déborde pas sur les parties communes, je n'interviens pas... et ils ont tous tellement peur des araignées et des fourmis que les chambres sont rangées...in extremis !), porter les caisses aux containers de tri au bout de la rue, passer la tondeuse à l'occasion l'été, donner un coup de main-bricolage si besoin, ranger les sacs lorsque je rentre des courses chargée comme une mule sont des évidences chez nous. Et que l'on se rassure, il leur reste largement le temps de s'adonner à la chose scolaire, jouer à W.O.W., "facebooker" avec les potes, aller voir les potes, jouer au foot dans la rue, dévorer des livres, pratiquer leurs activités sportives, aller trainer dans la forêt au dessus de la maison ET râler-que-c'est-mieux-chez-Machin-que-ses-parents-sont-plus-cool...

De même, nous parents rechignons rarement à faire le taxi (nous sommes en zone rurale, les copains sont donc forcément éloignés... et ici, en vélo ça monte beaucoup !) A ne pas sacrifier notre maigre temps libre à faire du ménage de famille nombreuse, du repassage de famille nombreuse, du pliage de linge de famille nombreuse (imaginez le temps que je passerais à plier et repasser du linge quand je fais 2 lessives de 6 kgs par jour...), Doux et moi sommes plus disposés à sortir avec eux, les emmener en ballade, voir des expos ET avoir encore du rab' de temps pour recharger nos batteries personnelles(le minimum de temps, hein, faut pas abuser non plus !) et être ainsi moins énervés et plus "cool"(que nous le serions sinon !)
Parce que nous ne pouvons pas être au four et au moulin, parce que notre quotidien serait vraiment, vraiment moins confortable pour tout le monde sans l'un ou l'autre de nos deux salaires, parce que le rôle de parent occupe 24h par jour et ne se résume pas à faire du ménage-de la lessive-les courses-les repas pour 8, finalement chacun préfère participer au bien-être de la collectivité, les bénéfices qu'il en retire semblent être largement supérieurs à l'investissement requis !

Et puis parce que nous avons 4 garçons, et je suis pour le partage asexué des tâches ménagères !

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mardi, novembre 10, 2009

Mieux






Merci pour vos commentaires. J'ai été vraiment très touchée, j'en ai même pleuré devant mon ordi, c'est vous dire. Merci pour vos mots si doux, votre empathie, vos gestes si spontanés. Alors que finalement nous ne nous connaissons pas, nous pourrions même nous croiser sans le savoir.
Si chaud au coeur... Et qui oserait prétendre qu'Internet coupe du monde, de la vraie socialisation ? Je socialise. Avec de vraies personnes. La preuve. Vous étes formidables. Vraiment.

La force de continuer à traverser tout ça, je l'ai. Avec des coups de mou parfois. Des coups de rage. Un peu comme si on annonçait à un pauvre hère qui aurait survécu à la traversée à la nage du détroit de Gibraltar en pleine nuit (dans le sens que vous voulez...) que sa galère est loin d'être terminée (loin s'en faut...) Il aurait, à raison, un bon coup de désespoir... mais tellement de hargne qu'il poursuivrait sa route. Vaille que vaille.


Les journées peuvent être si belles...

Le bonheur du week end, ce sont les retrouvailles avec une "amie de 30 ans"; la découverte de curiosités alimentaires exotiques comme l'aïrag, lait de jument fermenté mongol...

Les premiers flocons qui s'évanouissent sur le pare-brise de la voiture en redescendant de là-haut.

Ce sont les mots d'enfant de la grenouillette. Qui termine un dessin avec son frère Zébulon, d'après un livre sur les fonds marins. Elle a dessiné unecroixdemerde.

Une quoi ? Je redemande, je n'ai pas bien compris...

Unecroixdemerde. Elle marmonne, je ne comprends toujours pas... Je lui demande de répéter en articulant, ma chérie.

UNE-CROIX-DE-MERDE.

Ah. C'est bien ce qu'il me semblait. Je finis par aller voir moi même ce qui lui a servi de modèle...

Mais oui bien sûr... Une étoile de mer !

Mab, pas de Nono en vue... toutefois, j'ai quand même une histoire sous le coude, pour les jours de disette bloguesque !

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vendredi, novembre 06, 2009

Vénère...

Enervée...
Furieuse...
Verte de rage...
Indignée...

On croyait l'affaire close... du moins, nous nous satisfaisions d'un certain stand-by... C'était utopique. Comme de cacher la poussière sous le tapis... Les adventices repoussent toujours...

Bis repetita.

Same player, shoot again.

Cette fois, les garçons ont dit OUI au protocole. Par lassitude. Pour en finir "avec ce truc qui ressemble à rien".
Pour évaluer leur pleine et entière adhésion, ils ont été reçus une seule fois, 15 mn chacun. "Tu es d'accord ? ça va bien à l'école, pas trop perturbé ? Non ?"
Bon OK, adjugé. Aucun dégât collatéral constaté.
Bien sûr je n'étais pas au courant... cette fois. Sinon, j'aurais fourni moults et moults preuves des dégats collatéraux que les fidèles de ce blog connaissent bien mieux que leur propre père (père ?!)

Pour faire court, à une opération suivra un changement d'identité administrative... le 1 du numéro INSEE deviendra un 2 et les garçons n'auront légalement plus de père existant. Même pas un père mort. Génération spontannée. Surgis du néant. (ça va être pratique pour leur faire faire un passeport ou leur renouveler leur carte d'identité...) Forcément une déchéance paternelle de l'autorité parentale de fait (pas une mauvaise chose, en ce qui nous concerne ... le quotidien sera plus clair... et le rôle de Doux qui les élève en sera également plus lisible)

N'empêche... plus de 7 années passées à étayer. A réparer sans relâche. Encore et toujours. A écoper en permanence, quand c'est colmaté avec l'un, c'est l'autre qui prend l'eau... Encore de longs mois usants à venir. A écoper encore et toujours. Mais le bateau prend déjà l'eau à gros bouillons, plus rapidement que ne peuvent souquer nos petites mains aimantes, à Doux et à moi. Des ados qui ruent trop violemment dans les brancards. Qui flirtent avec les limites. Toutes les limites. Tout le temps. Rattraper in extremis chaque fois, tout en surveillant attentivement les frères d'un oeil est un exercice dans lequel nous devenons experts, Doux et moi.
C'est un exercice épuisant. Usant. Les batteries ne se rechargent plus à mesure. Notre rôle est ingrat au possible. Il n'est qu'ingrat, d'ailleurs.

Et je suis fatiguée. Lasse. Epuisée. Je n'en peux plus de ne plus dormir depuis 8 ans.

Vraiment. Vous n'imaginez pas à quel point...

Dans les semaines, les mois à venir, j'aurai besoin de toute l'energie-que-je-n'ai-pas-mais-qu'il- faudra-bien-que-j'aie-quand-même. Je serai probablement moins présente ici. Chez vous, probablement moins bavarde également. Mais sans mots ici.

Ou alors, avec les mots de Nono, des mots plus durs et plus violents. Mon exutoire.

C'est bien tout ce qui sort de moi aujourd'hui...

Plus l'envie de rentrer chez moi le soir. Mais je vais rentrer quand même. Affronter tout ça. Bon an mal an.

Mais ce soir c'est week end... alors bon week end à vous.

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lundi, novembre 02, 2009

Piège ?

Ding dong...

Je remonte d'un coup en bordure de sommeil. Dans cette frange de la conscience où le monde est encore irréel, flottant, où les bruits d'outre-moi se mêlent aux restes d'un rêve.

Ding dong...

pop... Ma bulle éclate. D'une ultime respiration, j'ai atteint la surface. L'éveil. A l'affut. Raide dans mon lit. Je tourne la tête lentement vers le réveil. 02:08.

- Tu es réveillée ?

Doux non plus ne dort pas. Je n'ai donc pas rêvé. Parfois la nuit, lorsque mon esprit flotte entre deux mondes, ça tintinnabule dans ma tête. Des bruits s'entrechoquent. Réels ou irréels, je ne sais jamais. Il m'arrive alors de me lever, de faire le tour de la maison, pièce par pièce, de dresser l'oreille longuement et d'observer les chats. D'être apaisée par leur quiétude et l'engourdissement de leur corps mou sur le tapis. Fausse alerte.
Cette nuit, ça n'en était pas une.

- Qu'est-ce qu'on entend ?

Ding Dong.

Le carillon se fait impérieux. Je pense à la voisine. D'un même bond, nous nous levons. Descendons. Lumières allumées. D'un doigt leste je soulève le bord d'une lame du store de la cuisine. Ma fenêtre de concierge, celle qui donne sur le perron. La lumière du porche est allumée. Deux hommes. Un jeune. Un moins jeune.

J'ouvre la porte précautionneusement, un pied calé à mi-course. Doux est derrière moi, légèrement en retrait. Dans l'ombre.

Le jeune homme s'excuse de nous déranger. Il explique. L'homme qui l'accompagne est un routier anglais tombé en panne d'essence. Il ne dispose que de billets, pas de carte bleue pour remplir le réservoir de son camion à l'automate du supermarché d'à côté. Enfin... d'à côté... un petit kilomètre quand même. Il demande si nous pourrions lui prendre de l'essence avec notre carte bleue, il nous paierait en espèces.
Intriguée, je me dit que voilà une bien étrange requête à 2h du matin en presque pleine campagne. Je réponds la première chose qui me vient à l'esprit. C'est une crétinerie et je le sais.

- Euh... je n'ai pas de carte bleue.
Après tout, il y a mille raisons très plausibles pour lesquelles je pourrais ne pas avoir de carte bleue...

Le jeune homme me regarde surpris, se tourne vers l'autre homme qui commence à réexpliquer, en anglais

- I'll pay you, I've got "kêch".
Un fort accent du Nord de l'île.
Il a sorti une petite liasse de billets.

Je me sens navrée pour lui, compatissante, mais pas suffisamment pour sortir à 2h du matin, prendre la CB familiale, aller au Super*U local devant lequel il ne passera personne avant des heures... avec 2 inconnus... au douteux prétexte qu'un chauffeur routier dont c'est le métier de rouler, n'a pas anticipé une panne aussi prévisible ... qu'il a une livraison à faire en France sans un moyen de paiement de secours... Qu'à 2h du matin, son camion se trouve sur la Nationale qui longe l'autoroute, sur laquelle une station ouverte toute la nuit l'aurait dépanné à 10 km de là...

Doux est sorti de l'ombre, leur a suggéré d'attendre le matin dans un hôtel l'ouverture du guichet de la station-service.

Les deux hommes ont eu un mouvement de recul à son apparition, se sont excusés et sont partis sans insister.

- C'est quoi ce plan foireux ? Ai-je demandé en refermant la porte.

- Un plan foireux.
A répondu mon Doux.

J'ai mis deux heures à retrouver le sommeil. Je ne pouvais m'empêcher de me demander "et si c'était vrai ?" Me justifiant en pointant les incohérences. Que fait-il en dehors de l'autoroute à 2h du matin ? Comment ne pas anticiper ce genre d'incident lorsqu'on est un professionnel du T.I.R ? J'ai échaffaudé des hypothèses. Peut être un chauffeur qui est son propre patron, obligé de tirer les prix au maximum, d'éviter l'autoroute qui coute un bras (surtout dans les Alpes), éviter la carte internationale dont l'utilisation dans une monnaie différente est soumise à surtaxation (aaaah oui, elle coûte cher, l'exclusion volontaire de la zone euro, n'est-ce pas !)

Peut être était-il vraiment dans la panade. Peut être n'était-ce qu'une ruse ... Je n'ai pas pris le risque. Ce n'est pas comme si j'avais trouvé un type ensanglanté sur mon perron, n'est-ce pas ?
Comment aurais-je réagi si j'avais été dans sa situation ? Je n'aurais, c'est sûr, jamais osé réveiller le voisinage de façon aussi impérilleuse en pleine nuit.

Sur ce, il s'est mis à pleuvoir dru. Elle est tombée pendant dix heures d'affilée.
A présent, les nuages découvrent doucement les crêtes de la Chartreuse, dévoilant les sapins poudrés de la première neige. Juste là, au-dessus. Si près.

Et vous, qu'auriez-vous fait à 2h du matin ?

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